Les cabines raccrochent
Le jeudi 16 avril 2015, le Sénat adopte un amendement en faveur du démantèlement des cabines téléphoniques. L’article L35-1 du Code des postes et communications électroniques contraignant Orange à fournir ce « service universel » est abrogé . L’arrêt de mort de la cabine publique est signé.
Les 65.250 cabines sont dès lors l’objet d’une disparition programmée. La cabine téléphonique, située au coeur de l’espace public, présente dans notre paysage depuis 1981 - même si l’explosion des téléphones portables avait précipité son déclin depuis 2007- était donc sur le point d’être supprimée ! A l’annonce d’une telle nouvelle, le désir d’immortaliser cette icône du mobilier urbain s’est imposé. Il fallait donner de la voix à celle qui la perdait.
La démarche consiste, non pas à faire un état des lieux exhaustif des cabines téléphoniques françaises en 2018, elles ont déjà disparu, mais à produire un témoignage artistique et personnel.
Les photographies immortalisent ces « refuges » dans lesquels tout un chacun a personnellement passé de nombreuses heures à l’abri du vent, de la pluie et du tumulte extérieur. Comment oublier ces plongées dans les senteurs mélangées des parfums envoûtants ?
Comment ne pas se souvenir des effluves désagréables des cigarettes et des odeurs de transpiration, alors qu’une voix au bout du fil, à l’autre bout du monde peut-être, venait soudainement illuminer l’instant.
Ce travail photographique met en lumière l’édicule de verre cubique et nous confronte à une disparition qui marque la fin d’une époque. Les prises de vues nocturnes avec omniprésence du noir, symbole de mort, de deuil, font disparaître certains détails de la rue, du paysage, à la manière d’un clair obscur, tout en accentuant parfois d’autres signes de notre quotidien mis en relief par les couleurs chaudes des éclairages publics et des phares de voitures : architectures civiles et religieuses, signalétiques, bancs, barrières de trains, affiches…
Le regard se promène dans des espaces quasi déshumanisés,quelquefois lunaires, pour finalement s’arrêter sur les cabines téléphoniques, qui, vêtues de cyan, comme en apesanteur, hors du temps, s’apprêtent à s’élever tels des corps célestes.
Photographe de mode et portraitiste à Paris puis New York durant une dizaine d’année, Pascal Preti a travaillé pour de nombreux magazines internationaux tels que Vogue, Elle, GQ, Surface, Trace, Brutus Winds...C’est aujourd’hui le travail artistique sur des thèmes variées qui est privilégié. Les lumières colorées de ses photographies révèlent un monde dans lequel l’environnent du sujet a autant d’importance que le sujet lui-même.
Lieu de l’exposition : Serres Gaillard
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